Ouverture de l'exposition « La performativité des objets »

La performativité des objets, 2019, Installation multimédia : papier imprimé, matériaux mixtes, ventilateurs, lampes et projections vidéo, dimensions variables

La performativité des objets, 2019, Installation multimédia : papier imprimé, matériaux mixtes, ventilateurs, lampes et projections vidéo, dimensions variables

Je suis vraiment très heureuse de présentée de nouvelles oeuvres installatives et évolutives à La maison de la culture Mercier du 3 mars au 13 juin 2021.

Voici un extrait du communiqué de presse :

L’exposition La performativité des objets est une installation réunissant un corpus d’œuvres qui s’intéresse à l’accumulation et à la réutilisation des objets et des matières ainsi qu’au détournement des savoir-faire artisanaux. Cette œuvre installative est composée de différentes zones entrant en dialogue et en interaction. Certaines zones proposent des expériences déambulatoires aux allures participatives ou performatives. D’autres zones exposent des objets, des images imprimées et des documents d’actions réalisées avec les éléments inclus dans l’exposition. L’ambiance de gymnase y est utilisée comme un dispositif général accentuant l’expérience kinesthésique des visiteurs. En proposant des déambulations et des récits poétiques, on nous permet de réfléchir à l’organisation de nos espaces, à la gestion des matières résiduelles ainsi qu’au potentiel expressif et performatif des objets et des matériaux qui nous entourent.

L’artiste aborde la création à partir d’une réflexion sur la perception, la représentation et l’occupation de l’espace. Explorant le seuil entre l’espace réel et l’espace imaginé, elle s'intéresse à ces deux moments comme un mouvement entre extériorité et intériorité, une circulation entre le dehors et la pensée. Les processus d’hybridation et de répétition sont au centre de sa pratique artistique. Ils génèrent des ambigüités entre les notions de surface et d’interface, entre l’espace de l’image et celle de l’objet. Ces principes de répétition, de multiplication et de médiatisation sont au centre de ces explorations et s’inscrivent dans un désir de lenteur et de partage. Cette exposition présentée comme un travail d’exploration en évolution saura en séduire plus d’un.

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La performativité des objets

Depuis deux ans, je travaille sur deux projets d’exposition individuelles. L’une de ces expositions, La maison étanche qui devait avoir lieu au centre d’exposition du vieux presbytère de St-Bruno en novembre 2020, a été repoussée en 2022. L’autre, La performativité des objets, devrait avoir lieu en théorie en février 2021 à la Maison de la culture Mercier, mais elle pourrait aussi être repoussée. Avec l’incertitude actuelle, il devient difficile de trouver la motivation à poursuivre la production. De plus, ces projets deviennent envahissants dans l’atelier. Voici donc une tentative de visualiser le travail a accomplir, un état des lieux de la pratique.

Tentative de visualisation des différents éléments qui pourraient composer l’installation.

Tentative de visualisation des différents éléments qui pourraient composer l’installation.

La performativité des objets réunira un corpus d’œuvres qui s’intéresse à l’accumulation et à la réutilisation des objets et des matières ainsi qu’au détournement des savoir-faire artisanaux. Les explorations présentées seront composées principalement de matériaux imprimés, d’objets récupérés, de documents textuels, photographiques et vidéographiques qui proposent des narrations autour d’expériences tactiles et matérielles. La cocréation est au coeur de ces explorations bien que présentement, il semble impossible de poursuivre dans cette voie. J’ai tout de même accumulé des documents issus d’autres expériences antérieures, notamment lors de mes résidences à L’imprimerie centre d’artiste (été 2018) et à Circa art actuel (été 2019).

Plan de l’exposition (toujours en processus).

Plan de l’exposition (toujours en processus).

Pour cette exposition, j’envisage la création de différentes zones qui entreront en dialogue et en interaction. Certaines zones proposeront des expériences déambulatoires aux allures participatives ou performatives. D’autres zones présenteront des documents textuels, photographiques et vidéographiques d’actions réalisées avec les éléments inclus dans l’exposition. L’ambiance de gymnase est envisagée comme un dispositif général accentuant l’expérience kinesthésique des visiteurs. Par exemple, l’utilisation de lignes colorées au sol, de tapis colorés, de ventilateurs et de lampes d’appoint permettra de délimiter et de dynamiser les différentes zones.

En proposant des déambulations et des récits poétiques, cette exposition permettra de réfléchir à l’organisation de nos espaces, à la gestion des matières résiduelles ainsi qu’au potentiel expressif et performatif des objets et des matériaux qui nous entourent. Les principes de répétition, de multiplication et de médiatisation sont au centre de ces explorations et s’inscrivent dans un désir de lenteur et de partage.

« La débâcle » à la Foire d'art contemporain de Saint-Lambert

La débâcle est présentée dans une vitrine urbaine pendant la Foire d’art contemporain de Saint-Lambert. L'expérience in situ est ce qui apporte le plus à ma pratique. Réaliser ce travail dans la vitrine d'un magasin désaffecté semble avoir beaucoup de sens en ce moment. Dans le contexte actuel, c'est peut-être la meilleure façon de rejoindre le public.

Même après plus de 10 ans, cette oeuvre évolutive réalisée lors de ma maitrise m'étonne encore. La débâcle provoque toujours de belles réactions, tant chez les petits que les grands! Sourires, émerveillements, observations intenses et grandes émotions. Grâce à la présence de Jean-Simon DesRochers, le montage a été super efficace. En plus de redécouvrir l'oeuvre, nous avons documenté l'ensemble du processus : stopmotion, caméra au corps, plans larges. Voici deux vidéos stopmotion qui documentent une partie de cette expérience.

La débâcle, à voir ou à revoir au 434 avenue Victoria jusqu’au 10 octobre 2020.

Jour 1 : quatre heures de montage en 23 secondes.

Jour 2 : intégrer le décor en 42 secondes.

Un jardin dans l'atelier

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Dialogue.

Il y a un jardin dans l’atelier. Je crois qu’il a quelque chose à m’apprendre. J’ai le sentiment qu’il est là depuis longtemps, un récit en latence dans mes installations passées. Il envahit l’espace, il occupe mon temps, de plus en plus de temps.

Nous pensons souvent que le jardin est fait pour flatter la vue, qu’il est ornement avant tout esthétique. (…) Nous tirons le jardin vers le tableau de paysage, nous le pensons peint alors qu’il est surtout planté. En somme, nous le transformons trop facilement en paysage. Or, ce qui prend en compte la plantation, le travail effectué, le projet, c’est la narration, le récit. Les plantations se font dans le temps et réclament, pour être décrites, le temps du récit qui découle ses séquences dans une succession datée, séquences dont l’enchainement tient davantage au fil du récit qu’à une composition visuelle. Cauquelin, 2003, p.37

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La constitution du jardin présente des filiations avec mon approche de la création. Comme si mes gestes étaient liés à un rituel, « une manière d’exister face aux objets » comme l’énonce Anne Cauquelin dans le livre L’invention du paysage (2000, p.13). Ils dessinent un parcours sensible. Ce n’est pas une réaction aux choses du monde, c’est plutôt un travail qui est lié au développement d’une histoire, un récit à la fois poétique, personnel et matériel.

Séquence après séquence, le « je » du narrateur, le « je » de l’auteur, celui qui prend la parole et vous emmène sur la ligne de son récit, est bien le « je » du jardinier, celui qui vous promène de proposition en proposition et qui instaure le récit de promenade comme mode de communication. Cauquelin, 2003, p.38

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Depuis longtemps, je m’intéresse à la représentation et à l’occupation des espaces - des espaces théoriques, des espaces abstraits. Mais en période de confinement, l’espace à soi devient précieux. Comment l’habiter? Et puis, qu’est-ce qu’on en fait de cet espace? Habiter, c’est d’abord prendre le temps de vivre, développer son propre récit.

Le premier jardin est celui de l’homme ayant choisi de cesser l’errance. (Clément, 2012, p.12)

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Actuellement, faire un jardin vivrier semble prendre tout son sens. Dans l’atelier, la planification et la plantation des semences demandent l’organisation d’installations particulières : laboratoire, serre, jardin intérieur. Les plantes ont parfois besoin de chaleur, de froid, de lumière et d’ombre, d’eau, de repiquage, plus de terre (les tiges montent souvent trop vite). L’entretien de tout ce petit monde demande une constante adaptation. Hier, il fallait sauver les semis de laitue, aujourd’hui, c’est les plants de concombre qui manquent de place et cherchent la lumière. Il faut parfois ouvrir la fenêtre, un peu de froid et de vent pour retarder la croissance.

C’est au jardin potager, et seulement en ce lieu, que le jardinier attentif à la plus grande économie de gestion procède au recyclage des déchets et des énergies. Tout y figure en puissance : l’utile et le futile, la production et le jeu, l’économie et l’art. Du jardin potager naissent tous les jardins, il traverse le temps et contient le savoir. Clément, 2012, p.17-18

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Le jardin est un projet. Il demande engagement. Il intervient entre les autres activités familiales, professionnelles. Il donne un rythme. Il est la curiosité des voisins, des amis, de la famille. Sera-t-il productif? Une réussite ou un échec?

Le potager, à lui seul, traduit une politique volontaire et, en dépit de son dessin autoritaire, un esprit de liberté. Installé pour produire, agrémenter et expérimenter, il se destine au partage et à l’amélioration des conditions de vie : mélange de maîtrise, de physiocratie et d’humanisme généreux (…). Clément, 2012, p.25-26

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Et puis dans l’atelier, il a des effets. Ralentissement, prise d’espace. Pour le bien de la plantation, tout est emboité, déplaçable, transférable, en transition. Cet état me plait beaucoup. Un peu de vert, beaucoup de pots de terre sur des plateformes, des roulettes, des étagères.

Comme le site, le jardin est en retrait de l’architecture, bien qu’il en fasse partie. Il est pris dans une logique d’emboitement, dépendant de séparations et de « lots ». Cependant, tout comme le site, il a partie liée avec le lieu, sa profondeur et sa mémoire. Il accueille la dimension du temps, ce qui n’est pas le cas de l’espace géométrique. C’est un espace intérieur à l’extérieur du bâti et, en retour, un extérieur (un lieu) à l’intérieur du construit. Comme le site, il n’est pas paysage (…), car il se donne, non pas comme un ensemble, une totalité, mais comme addition de détails, fragments cousus. Cauquelin, 2003, p.106

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Il faut tout réorganiser en fonction de la pousse et des besoins. Un mouvement continuel qui me retire de l’espace abstrait auquel je me suis habituée. Je contrôle peu de chose. C’est une accumulation de détails qui peut faire une différence.

La fragmentation devient alors un moyen pour atteindre le but : l’unité reconstituée. Nous sommes dans le domaine des opérations de rangement et d’explications; on déplie et découpe pour mieux plier et remettre ensemble. (…) Dans cette version du fragment – et ce sera celui de la poésie-, le fragment devient acte; acte de langage, il donne vie à l’objet; acte de transformation, il métamorphose le banal en sublime, élève le quotidien à la hauteur d’un art total. Cauquelin, 2003, p.111-114

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L’atelier devient un espace de projets fragmentés, d’accumulation d’histoires. Bientôt le jardin sortira dehors. Je pourrai retrouver mon espace pour déployer d’autres expériences, d’autres tentatives. La création restera cependant habitée de ce jardin intérieur.

Références :

  • Cauquelin, Anne. (2000). L’invention du paysage. Paris : Presses Universitaires de France

  • Cauquelin, Anne. (2003). Petit traité du jardin ordinaire. Paris : Éditions Payot et Rivages

  • Clément, Gilles. (2012). Une brève histoire du jardin. Paris : Éditions JC Béhar

L'actualité fantomatique des journaux couleur pêche

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Nous gardons les journaux. Ils nous envahissent.

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Imprimer une couleur pour recouvrir les textes, les images.

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L’actualité fantomatique des journaux couleur pêche.

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Matière première, papier en abondance.

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Faire des piles, faire des pots.

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Accumuler les retailles.

Objets du quotidien, objets de création

Les mains de ma fille.

Les mains de ma fille.

Être confinés en famille pose de nouveaux défis pour poursuivre le travail de recherche et de création. Comment utiliser ce contexte pour repenser la modalité des gestes du quotidien et la manière d’être et d'occuper l’espace domestique et celui de l’atelier?

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Dans la maison étanche, il y a d’abord la question des matériaux (je travaille la matière). Qu’est-ce que j’ai de disponible? Quels procédés puis-je utiliser et reproduire? Ensuite, il y a l’intégration dans le quotidien de la famille. Est-ce possible de faire de la cocréation, de jouer avec la temporalité des journées afin de produire de nouvelles expériences? Comment brouiller les frontières entre les activités ménagères et la création?

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Observations. Dans l’atelier, il y a beaucoup de résidus de création, d’objets récupérés et de papier (toujours le papier) et le désir d’accumuler des formes colorées, des émotions des souvenirs. Dans la maison, il y a beaucoup d’objets aussi : du linge à plier, de la vaisselle à laver, des objets à ranger, des plantes à arroser, des habitats à maintenir propres.

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Tranquillement, on trouve des objets et des formes. On fait des moulages de papier mâché, des empreintes, en rouge, en bleu, en jaune et en blanc. On recycle les papiers de livraison, les retailles de papiers japonais aussi. La qualité et les matérialités sont différentes, les gestes non hiérarchisés.

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Et puis il y a les autres objets, des bouts d’emballages, une balle de massage, des tapis de coupe, une vieille table bricolée. Les choses s’assemblent d’une drôle de manière. On perd le contrôle. Peut-être que tout ce mouvement ne servira à rien.

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On découpe, on arrange, on multiplie, on empile, on documente. Une frénésie d’occuper le temps et l’espace, de faire quelque chose. Le quotidien comme expérience esthétique.

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État des lieux

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Les projets en attente, le matériel de yoga et les livres s’entremêlent dans l’atelier. La frontière entre les gestes de création, de recherche et de mise en forme semble de plus en plus floue. Entre l’ordre et le désordre, les objets sont déplacés, repositionnés en suivant les besoins. Une installation semble prendre forme dans ce mouvement quotidien.

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Sur la table, quelques livres, des images, des crayons de couleur. Je m’ennuie des collaboratrices rieuses.

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